lundi 3 août 2015

HELP ! AU SECOURS !


Le Figaro publie sous le titre Comment la Chine pourrait déclencher la Troisième Guerre Mondiale un article de synthèse qui fait froid dans le dos en accumulant les à-peu-près et s’achève par un pathétique appel au secours de l’américanophile patenté, Alexandre Devecchio.

Sur les faits, nous ne nous appesantirons pas. Les fidèles lecteurs de ce blog les connaissent, et depuis longtemps. L’interprétation est plus amusante.

Et donc, dès le titre, la messe est dite. Les vilains Chinois vont déclarer la guerre aux si gentils Américains, et par là-même, au monde entier. Sourions de cette présentation. La Chine n’a aucune envie de guerre. Elle demande simplement un traitement égalitaire entre puissances. Si un pays s’arroge un droit, tous les autres pays peuvent réclamer le même droit. C’est aussi simple que ça.

Après avoir expliqué que nous sommes revenus à la guerre froide, Devecchio a cette conclusion étonnante :

La superpuissance montante, la Chine, ne supporte plus d'être encore dominée par la superpuissance déclinante, les Etats-Unis et les Etats-Unis refusent de céder leur statut de puissance dominante à la Chine.

C’est évident. Quel pays peut encore accepter d’être dominé par un autre ? C’est à dire être considéré comme une sorte de champ ouvert qu’on laboure à sa guise ? Selon l’auteur, en toute bonne logique, qui ne se couche pas devant les USA est un fauteur de guerre.

Mais le plus drôle restent les motivations supposées des Chinois :

La Chine veut triompher et obtenir l'hégémonie sur la planète pour être assurée que son mode de gouvernance totalitaire ne sera plus inquiété par les forces démocratiques qui existent en Chine et hors de Chine. Des copies d'un tel scénario circulerait au Pentagone. (je n’ai pas corrigé l’orthographe du folliculaire).

La volonté hégémonique de la Chine serait donc un souci de faire perdurer le gouvernement du PCC jugé « totalitaire ».. Outre qu’il faudrait définir le totalitarisme avant de porter un jugement, le choix des mots vaut son pesant de jujube. Personne ne peut penser que la Chine sera « inquiétée » par les « forces démocratiques ». C’est vrai que la famille Bush se distingue par son souci « démocratique » ! Aujourd’hui, la Chine ne veut plus être emmerdée par des juges autoproclamés qui passent leur temps à critiquer toutes ses décisions. Par exemple, quand Pékin met en place une industrie des énergies renouvelables et que le syndicat américain USW dépose plainte à l’OMC pour concurrence déloyale. Mais quel pays a envie qu’un autre pays (fut-ce un allié) passe son temps à le critiquer ?

Pékin anticipe maintenant d'infliger très prochainement une défaite monétaire majeure aux Etats-Unis en retirant au dollar son privilège de monnaie du monde pour l'attribuer très vite ensuite au yuan. Cela ferait basculer irrémédiablement et irréversiblement le rapport de forces en faveur de Pékin.

Bon, ça, on en a déjà parlé ici. Pékin n’a rien créé. Les USA se sont endettés tous seuls, les USA ont décidé quasi-unilatéralement d’abandonner l’étalon-or, pour pouvoir vendre au monde entier une dette sans contrepartie. Mais qui a envie d’acheter une dette que le débiteur ne pourra pas honorer ? Les Chinois ne demandent rien d’autre : que la dette américaine soit adossée à des biens réels, dont l’or fait partie.

Les USA ont basé leur modèle sur l’argent et ils n’ont plus d’argent. Dommage pour eux. Ils en sont totalement responsables. Et donc, ils hurlent à la sauvagerie du créancier qu’ils accusent de tous les maux. C’est un grand classique des rapports débiteur/créancier. La vérité, c’est que les BRICS ont commencé de créer des institutions monétaires qui ne doivent rien aux USA et que de plus en plus de pays se détournent de Washington. Il suffirait…rien du tout. Quand on assoit la puissance d’une Nation sur des biens virtuels plutôt que physiocratiques, c’est ce qui arrive.

Mais le plus beau reste la conclusion :

Si les pays européens jouent alors le jeu de Pékin et de Moscou pour détrôner le dollar, on peut craindre le pire. Si au contraire, ils se portent en bouclier du dollar, Pékin en déduira qu'il est encore trop tôt pour engager l'affrontement territorial.

Help ! Le Figaro relaie l’appel au secours des USA aux politiques européens. Please, ne nous laissez pas tomber. C’est que Washington a désormais compris qu’il s’était trompé. La puissance militaire de l’OCS dépasse vraisemblablement celle de l’OTAN. Pas seulement en nombre, mais aussi en qualité des équipements. On vous a parlé ici des chasseurs de cinquième génération. Mais il y a autre chose. Même dans l’aéronautique, la Kalashnikov a fait école. Les Chinois continuent de produire des avions rustiques, peu chers, mais nombreux. Ils savent que l’aviation sophistiquée coûte cher. Ils font donc des avions de pauvres pour pays pauvres.

Pour tout observateur pas complètement obsédé par la prétendue puissance américaine, tout ceci est très clair. Voilà des siècles (mais oui !) que les USA humilient la Chine. Guerres de l’opium, soutien pharaonique au Guomingdang,, utilisation des mouvements religieux, guerres de Corée ou du Vietnam, tout a fait bois. Aujourd’hui, la Chine présente la facture et les Américains sont incapables de la payer.

Si guerre il doit y avoir, elle viendra de Washington. Et Alexandre le Petit se trompe. Les pays européens sont incapables de défendre le dollar. Ne fut-ce que parce que Pékin peut toujours sortir le joker Moscou. Et surtout parce que les Occidentaux qui, depuis vingt ans, ont été incapables de comprendre la stratégie chinoise ne vont pas, tout soudain, être touchés par la grâce. Enfin, parce qu'il faudra bien comprendre que le soft power ne suffit pas. La guerre, c'est pas du cinéma.

Lénine disait que les capitalistes vendraient la corde pour les pendre. Et bien voilà. Nous y sommes. Et Washington utilise le Figaro pour relayer son appel au secours.

On en reparlera…


PS : regardez bien les dates. La plupart de ces articles ont plus d'un an. Conclusion : lisez moi, c'est gratuit et vous serez informés avant les journalistes du Figaro









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